Tri-Hie et les Griffes

Cette Histoire est celle de l'Amour de Tri-Hie et des Griffes, et de leurs enfants.

Elle commence il y a très longtemps. En ces temps là la première Guerre du Sombre était sur le point de commencer, et les Trõlls batifolaient joyeusement sous la montagne profitant des connaissances et des merveilles prodiguées par les Dieux. Toutefois c'est à cette époque là que la Jalousie avait commencé à faire son Oeuvre. Les Trõlls organisaient donc des tournois pour savoir qui avait la plus grosse. Tout le gratin du Hall y participait ou y assistait et c'était l'occasion de ripailles, beuveries et autres danses frénétiques, comme seul l'Âge d'Or de la Trõllanité avait su y donner le jour.

Les Griffes étaient un Guerrier de Lihã. Il fut envoyé en émissaire en dehors du territoire de sa Fratrie pour participer à l'un de ces tournois. Et c'est en cette occasion qu'il rencontra Tri-Hie. Elle était la merveille d'un Clan qui s'était dédié à la protection de la caverne qui vit l'arrivée des Dieux. Cette tribu était respectée et enviée. Elle avait en effet su écouter et profiter des enseignements des Cinq Dieux et on disait d'elle qu'elle était bénie. Tri-Hie était donc le joyau de cette tribu, humble et généreuse, aux formes divinement rondes et dont les danses mettaient en transe quiconque avait un pif entre les jambes. Elle était la grâce, la beauté et la bonté.
Ainsi les Griffes virent-elles Tri-Hie et ne purent plus jamais lever leurs yeux d'elle. Elles lui firent leur cour et lui dédièrent leurs combats de ce tournoi. Et malgré la différence d'âge et de statut, Tri-Hie accepta ce qu'aucun trõll n'avait osé lui demander jusque là. C'est ainsi que naquit la légende qui accorde aux Griffes d'être l'un des plus formidables guerriers que le Hall ait connu. Car alors qu'elles étaient certes un guerrier confirmé, l'enjeu de ce tournoi leur permit de se surpasser, et depuis ce temps on ne compte que deux défaites à leur palmarès.

Les Griffes gagnèrent donc la main de la douce et tendre Tri-Hie. A son contact elles furent transformées. Avec Lihã les Griffes avaient appris à vénérer la force et le pouvoir du Blãblã et des armes. Elles découvraient maintenant la douceur, la beauté d'une fleur, de la fraîcheur et d'une âme. Sur le chemin qui les emmèneraient au territoire de la Fratrie des Trõlls Noirs ils vécurent des mundideys de bonheur et d'extase. Mais cet endroit fut une déception pour celle qui avait été habituée au faste, à la joie et aux arts. Lentement les Griffes virent la morosité envahir sa trõllette qui sentait l'Individualisme à l'œuvre et la brisure qu'il amènerait. Les Griffes essayèrent bien de réchauffer Tri-Hie en faisant venir quelques baladins et autres artistes. Mais ceux ci redoutaient de venir au territoire des Sept et n'y trouvaient aucune inspiration. Rien n'y fit et même l'amour ne put remplacer le bonheur qu'avait connu Tri-Hie pendant sa vie au centre du monde. En même temps la suspicion gagnait les Trõlls Noirs qui ne comprenaient pas et jalousaient Tri-Hie.
En un dernier espoir de trouver une nouvelle flamme pour attiser leur amour, et les Griffes ne pouvant avoir d'enfant, ils décidèrent d'adopter deux orphelins vagabonds.

Ils vivaient parmi le peuple des Sept et adoraient Lihã. Ils aimaient et respectaient leur père pour la force et le respect que celui-ci imposait. Mais par-dessus tout ils adoraient leur mère pour qui ils étaient devenus la seule occupation. Mais arrivèrent les rumeurs des prémices de la Guerre du Sombre avec les meurtres de Trõlls adorateurs de Lihã.
Les Griffes firent merveille pendant cette guerre. On se référera à leur histoire pour se souvenir de leurs exploits et de leur chute face au Glacier lui-même. Honteux de leur défaite les Griffes revinrent en se cachant au territoire de la Fratrie. C'était pour gagner Tri-Hie qu'elles étaient devenues ce guerrier implacable. Mais les Griffes avaient été vaincues... lentement leur honte et le malheur de Tri-Hie grandissant devant cette guerre immonde qui se profilait menaient les Griffes vers la folie.
Elles demeuraient cachées de la vue de tous, travaillant secrètement à la réalisation d'un sort qui leur permettrait d'assouvir leur vengeance contre le Glacier. Même les paroles douces de Tri-Hie ne savaient les réconcilier avec elles même. Devant les supplices de son doux amour, les Griffes restaient sans savoir comment réagir. Entre l'honneur et l'amour il fallait choisir. Et ce fut Lihã qui l'emporta. Lentement l'isolement emmena les Griffes vers leur malédiction...

Car un jour le plus jeune et le plus turbulent des deux frangins, partit secrètement du territoire de la Tribu de Lihã explorer les merveilles du Hall que lui avait décrit sa mère. A son retour il fut enchaîné pour avoir mis en danger le secret du territoire de la Fratrie en temps de guerre, et les Sept Trõlls Noirs durent décider de ce qu'il adviendrait de lui.
Les Griffes sortirent alors de leur tanière, sales, puantes et les yeux rouges de fatigue. Elles jurèrent qu'elles avaient pour elles la loi du plus fort et que par les armes elles s'opposeraient à la sentence de mort qui fut prononcée par ses six Frères. Mais les Griffes n'étaient pas de taille à s'opposer à l'armée de Lihã. Les Griffes furent défaites lors de leur 6ème combat : exténuées et sans forces, les Yeux n'eurent qu'à les transpercer de leur regard pour les voir s'effondrer. Vaincues à nouveau, les Griffes encourraient le même jugement que Krän. Ainsi, cédant à la Honte et désirant préserver ce qu’elles croyaient subsister en elles d’honneur et de foi, les Griffes succombèrent à la Noirceur et sombrèrent totalement dans la folie. Nul jugement ne pouvant être appliqué par soi-même ne devant être rendu, les Griffes prirent Tri-Hie, Krän et Craygan pour les sacrifier à Lihã, fomentant dans leur folie de compléter leur rituel en Lui dédiant leurs âmes. Elles pensaient obtenir de leur Sombre Maître qu’Il leur accorde leur vengeance contre le Glacier, et ainsi recouvrir leur honneur.
Horrifiée et tétanisée par tant de Noirceur, Tri-Hie ne comprenait rien de la folie qui habitait son trõll et sa fratrie. Elle était prostrée, entourée d'adorateurs fanatiques et fatigués par la guerre.

Elle assista impuissante à la lutte qui animait Les Griffes. Elle invoquait, prise de désespoir, la protection de Mun-Di pour ses enfants. Elle pouvait ressentir de noires entités se presser autour d'elle. La Mort, hideuse, en appelait à son sang. Soudain ... un flash ! Tri-Hie, le temps d'une révélation fugace, se sentit apaisée. Mun-Di était là. Mun-Di saurait protéger ses enfants... même si ce salut devrait passer par un long parcours pour les deux frangins. Un parcours de douleur, mais un parcours qui les méneraient à la vie, à la libération et à une connaissance supérieure.
Tri-Hie, calme et résignée s'avança alors vers son compagnon. Méconnaissable, les yeux injectés de sang, il attendait, sa masse d’armes légendaire à la main, la venue de sa première victime.
Adressant un dernier sourire à ses enfants, elle s'approcha de l'autel et, se livrant à son compagnon, ferma les yeux.
Une douleur intense la traversa ... "Mun-Di !", un voile rouge obscurcit sa vision ... "Mun-Di, par..".
Elle ouvrit la bouche pour lancer un cri, mais aucun son ne sortit ... "Mun-Di, pardonne ...". Elle lança un dernier regard en direction de ses enfants ... "Mun-Di, pardonne moi !".
Tri-Hie s'écroula au sol, inerte.


Le reste est raconté dans la Légende des Griffes et la ballade des Sombres Frangins …
Comment les deux frangins assistèrent au sacrifice de leur mère, et comment Craygan intervint pour sauver son frère, encourant ainsi la vengeance de la Noirceur ;
Comment les Griffes se donnèrent la Mort mais reçurent à la place la malédiction qui firent d'elles " La Peine ", ou encore "Le Quatre fois Maudit".
Quant à Tri-hie ... tout laisse à penser qu'elle fut sacrifiée, et on n'entendit plus jamais parler d'elle ...

Mais la vérité est que le sacrifice de Tri-Hie fut entendu par Mun-Di et qu’il lui fut donné de survivre à ces évènements.

Une douleur intense. Des sons , un brouhaha lointain. Des mouvements, des rayons de lumière ... le choc des armes. Un tourbillon de bruits indistincts.
" Ou suis-je ?"
La belle trollette avait ouvert les yeux et regardait affolée, autour d'elle. Un grand troll souriant la contemplait avec bienveillance.
" - Calme toi, petite. Je suis Charly. Je t'ai recueilli et soigné. Tu étais gravement blessée, abandonnée par les tiens, laissée pour morte. Quel est ton nom ?
- Je ... je ne sais pas. Je ne me souviens de rien.
- Ca ne fait rien. Nous allons te donner un nouveau nom. Que penses-tu de ... Deudam ?".